Si le marché du travail de Lanaudière se caractérise par un dynamisme certain et une croissance démographique soutenue, il demeure proche des grandes tendances de la province. Jonathan Dupuis, économiste régional à la direction du marché du travail et des services spécialisés de Lanaudière, offre une analyse précise de la situation.
« Généralement, pour les grands indicateurs comme le taux de chômage ou le taux d’emploi, la région de Lanaudière est légèrement au-dessus de ce qu'on remarque au niveau québécois », explique-t-il d’emblée. En effet, à 5,6 % pour 2024, le taux de chômage de Lanaudière demeure un peu supérieur à celui du Québec, qui s’établit à 5,3 %.
Toutefois, cette différence s’explique par un plus grand nombre de chercheurs d’emploi, malgré un taux d’emploi élevé. Chez les 25 à 54 ans, le principal bassin de main-d’œuvre, les chiffres sont particulièrement rassurants, car les taux d’activité et d’emploi dépassent légèrement la moyenne québécoise, et le chômage y est plus faible (3,6 % contre 4,6 %).
La construction : un secteur phare
L’un des traits distinctifs de Lanaudière réside dans la prédominance du secteur de la construction. Selon le spécialiste, « cette particularité est directement liée à la forte croissance démographique observée dans la région. S’ajoute à cette croissance l’installation récente de nombreuses personnes qui vont travailler dans la région de Montréal. Ces dynamiques ont renforcé la demande en logements et en main-d’œuvre ».
Les chiffres officiels fournis par le gouvernement confortent cette analyse. Selon le tableau de la répartition géographique de l'emploi et perspectives d'emploi au Québec entre 2021 et 2023, la part de l’emploi dans le secteur de la construction représente 11,1% faisant de la région lanaudoise le territoire où cette industrie est la plus importante (la part au niveau québécois étant de 10,1%). Une dynamique qui confirme que la construction demeure un levier essentiel pour accompagner le développement de Lanaudière.
Des métiers en tension
Les défis de recrutement ne se limitent pas aux secteurs en pleine croissance. Selon la classification nationale des professions (CNP), 46 professions sur 516 connaissent localement un déficit de main-d’œuvre pour les perspectives 2023-2027. Parmi celles-ci figurent plusieurs métiers du domaine de la santé, de l’enseignement, de l’éducation à la petite enfance ainsi que des professions techniques telles que machinistes, soudeurs ou mécaniciens. Ces données officielles, fournies par la direction générale de Services Québec de Lanaudière, soulignent la nécessité pour la région de renforcer ses stratégies de formation et d’attraction de main-d’œuvre qualifiée.
Par ailleurs, le marché du travail présente des tensions quant aux postes vacants. Le taux de postes vacants dans Lanaudière s’établit à 3,4 % au dernier trimestre de 2024, légèrement supérieur aux 3,0 % enregistrés au niveau provincial. En moyenne, on compte 7 118 postes vacants dans la région, répartis entre divers secteurs, notamment la santé, les affaires et le secteur de la vente et des services. Ces chiffres témoignent d’un besoin persistant pour certains métiers, ainsi que des difficultés de recrutement qui en découlent.
Dualité régionale
Un autre enjeu majeur évoqué par Jonathan Dupuis concerne le phénomène du navettage. Une part importante des Lanaudois, notamment dans les MRC de l’Assomption et des Moulins, se rendent quotidiennement à Montréal pour y exercer leur profession.
« Il y a beaucoup de résidents qui vont travailler dans d'autres régions, notamment à Montréal », déclare-t-il. Et cette situation est ambivalente. D’un côté, la proximité de la grande métropole permet aux travailleurs d’accéder à des emplois de qualité, et les salaires ainsi perçus continuent de soutenir l’économie locale. D’un autre côté, le départ quotidien de main-d’œuvre qualifiée souligne un manque d’emplois adaptés sur le territoire. « Si des emplois de qualité équivalents étaient disponibles localement, il est fort probable que les gens resteraient sur place », souligne encore l’économiste régional.
En outre, la région présente une dualité marquée entre son nord et son sud. Le nord, caractérisé par une population moins formée et plus vieillissante, affiche des enjeux en matière de formation. L’économiste insiste : « dans un contexte où la demande pour des emplois techniques et professionnels, souvent accessibles par un DEP, reste élevée, la nécessité de soutenir la formation continue se révèle cruciale ».
Un horizon incertain, mais prometteur
Les perspectives demeurent toutefois porteuses, malgré les incertitudes liées au contexte géopolitique actuel et aux évolutions technologiques. Jonathan Dupuis met pourtant en garde: « il faudra que la population active apprivoise les nouvelles technologies, pour ne pas se laisser dépasser ». Il ajoute aussi que l’intelligence artificielle, tout en transformant certains métiers, ne remplacera jamais l’importance de l’humain.
En somme, le marché du travail de Lanaudière présente un paysage contrasté où se mêlent croissance, défis de recrutement et disparités territoriales. Si l’attractivité de la région offre de belles perspectives, il reste essentiel de s’adapter aux besoins des métiers en tension et de favoriser le développement des compétences. Les initiatives de concertation et les efforts pour attirer des entreprises sur le territoire pourraient ainsi constituer des leviers importants pour garantir un avenir prospère à Lanaudière.
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